Les sorcières du XXIème siècle : qui sont-elles et quelles sont leurs pratiques ?
Tarologie, rituels, lithothérapie, numérologie… Depuis toujours, la sorcellerie est très liée à la spiritualité. Mais avec le double sens féministe qu’a pris le mot « sorcières » aujourd’hui, on s’est demandé ce que devenaient ces femmes d’un autre type. Reportage.
Le mot sorcière est lourd de sens. Si on a des preuves de leur existence depuis l’Antiquité – et pratiquement depuis toujours –, elles n’ont, vous n’êtes pas sans le savoir, pas toujours été acceptée par le commun des mortels. Depuis l’époque romaine, par exemple, on punit de mort la magie noire. Et au Moyen-Âge commence la fameuse chasse aux sorcières. Tolérées parce qu’elles étaient souvent femmes de chamans, guérisseuses, herboristes ou sages-femmes, la figure d’une femme indépendante devient soudainement dérangeante pour l’instance catholique. Elles sont alors devenues bouc émissaires, étaient brulées, noyées, pendues. Dérangeaient surtout leurs croyances, divergentes de la pensée collective. Mais commençons par le commencement. Une sorcière, qu’est-ce que c’est ? Pour nous répondre et pour le bien de l’article, nous nous sommes entourées de femmes qui s’y connaissent, qu’on pourrait presque appeler les sorcières d’aujourd’hui… Tifenn-Tiana Fournereau, tarologue et psychographe, aussi connue sous le nom de Lavoisin en tant que chanteuse (ça ne s’invente pas), Morgane Jorge, numérologue et créatrice de Stones Club, marque de lithothérapie, et Devi Wookie, maitre reiki et fondatrice de Hana Kana, marque axée sur les rituels.
Selon Devi, « une sorcière est une personne ayant des connaissances et des capacités spirituelles plus « développées ». Elle est connectée à son environnement dans son entièreté (nature, faune, flore, énergies) et a acquis des connaissances ancestrales, souvent culturelles et spécifiques à sa région. » Pour Tifenn-Tiana et dans son imaginaire, « une sorcière, c’est vraiment une guérisseuse. C’est une femme qui soigne, qui est un peu médecin d’une époque. » Mais, si on s’en tient à la définition du dictionnaire, c’est « une personne soupçonnée de se livrer à des pratiques de sorcellerie. »
Les sorcières, d’éternelles féministes ?
« Aujourd’hui, ce mot revête d’autres visages que j’aime aussi, dont son aspect féministe. Et ça fait sens, parce qu’elles étaient et sont toujours des femmes hors-normes », précise Tifenn-Tiana. Et effectivement, depuis quelques années et particulièrement depuis la sortie du livre Sorcières : la puissance invaincue des femmes de Mona Chollet en 2018, on parle beaucoup des sorcières d’un point de vue militant. Jusqu’alors – comme le prouve les nombreux contes de fées –, on avait toujours vu cette figure comme laide, méchante, acariâtre, agissant pour satan et faisant le mal autour d’elle. Ce que nous dit Mona Chollet dans son livre, c’est que ce qui faisait peur aux chasseur·ses de sorcières, c’était l’indépendance et la force de ces femmes… Et des femmes en général. D’où ce massacre à grande échelle plus communément appelé « la chasse aux sorcières ». C’est ainsi que la sorcière devient icone du féminisme, puisqu’elle représente une femme qui dérange, une femme puissante, indépendante… Et détestée par simple misogynie.
Pour Morgane, « au-delà de l’aspect spirituel, une sorcière est une femme qui s’assume. Qui assume sa force, ses opinions, sa connexion avec elle-même et sa capacité à faire passer ses besoins en priorité. Elle a conscience de qui elle est, de sa valeur et n’a pas peur de venir creuser au fond d’elle-même pour se redécouvrir davantage. Elle est autant connectée à son corps qu’à son cœur ou qu’à son esprit et utilise ses capacités pour s’aligner avec sa vraie nature. Alors, oui, il y a un côté féministe évident chez les sorcières modernes. »
La spiritualité et les pratiques
Mais les sorcières au sens spirituel du terme existent toujours (et n’ont d’ailleurs jamais cessé d’exister). Tarologie, lithothérapie, sortilèges, manifestation, numérologie… Les pratiques sont diverses. Certain·es parlent de « don », Tifenn-Tiana préfère parler de « factulté ». Mais toutes les trois s’accordent pour dire que, peu importe ce que c’est, il faut le travailler. Morgane nous explique son point de vue : « On possède tous·tes des capacités. Certain·es les découvrent très jeunes ou de manière brutale. Pour d’autres, elles s’aiguisent au cours d’une vie. L’empathie, la sensibilité, la capacité à s’écouter sont de vrais outils qu’on doit utiliser et cultiver quotidiennement. Mais chacun·e doit rester libre d’utiliser ou pas certaines pratiques. Il n’y pas de protocole à suivre pour développer sa spiritualité… » Ou la sorcellerie.
Comme on vous le disait plus haut, il existe de nombreuses pratiques. Pour le bien de cet article et par curiosité, nous avons essayé la tarologie, la lithothérapie et la numérologie. La tarologie évoque l’art divinatoire par les cartes de tarot, la lithothérapie l’utilisation du pouvoir des pierres et la numérologie agit comme un thème astral, mais avec des nombres – l’astrologie y étant d’ailleurs très liée. Et il faut avouer que c’était impressionnant. Les femmes avec qui nous avons échangé ont été très intuitives et ont deviné des choses très personnelles, voire secrètes. Traits de personnalité, date d’un événement important, changement de chemin de vie, prénom… Tout était très précis. Après, il reste impossible de prouver que c’est grâce aux pierres que ça va mieux… Et non grâce aux discussions.
« Pour moi (et pour donner un exemple), le tarot n’est pas dangereux. Ça a une grosse valeur prédictive et divinatoire, mais je vois ça plutôt comme un guide qui permet d’avoir des conseils ou des mises en garde. C’est de l’accompagnement, c’est très lié à l’intuition et à la psychologie », nous explique Tifenn-Tiana. « Si un jour on me prouve que je suis mentaliste et que ce n’est pas une faculté (ce que je ne pense pas), je comprendrais et ce ne serait pas grave. Peut-être que ça aura aidé des gens, et c’est le principal. J’évolue dans ma spiritualité, ça ne me pose pas de problème qu’on change mes croyances. Si c’est fait dans une volonté de faire du bien et avec la naïveté la plus totale, je ne vois pas le souci de ces pratiques. »
Bien sûr, chaque personne a le droit d’y croire ou non, mais le plus important reste de ne pas juger les croyances des autres. Pour en savoir plus, on vous invite à suivre ces trois femmes et à lire Sortilèges, de Tifenn-Tiana.