Le bijou vintage prend place au premier rang
À nos mains, sur nos oreilles, autour de nos cous ou de nos poignets, les bijoux vintage et upcyclés ont la cote. Estimés par leur histoire, leur durabilité et leur écologie, on les aime aussi pour leur style. Récapitulatif.
Le marché du vintage a pris beaucoup de place dans nos vies. En 2020, selon Madame Figaro, il représentait plus de sept milliards de chiffre d’affaires, dont plus d’un milliard dans le milieu de la mode. Des friperies aux maisons de luxe comme Gucci, tout le monde s’y intéresse et s’y met. Souvent, ces pièces vintage sont remises à neuf voire upcyclées (littéralement « surcyclés » ou « recyclés »), c’est-à-dire qu’on réutilise leurs matières premières pour créer une nouvelle forme ou améliorer leur forme initiale. Pour les bijoux, c’est le même procédé. Ainsi, on peut reprendre une bague d’une ancienne collection et la remettre à neuf ou, carrément, en créer une nouvelle ! Pour en savoir plus sur le sujet, nous avons posé des questions aux fondateur·rices de quatre marques de bijoux : Céline Moret de Maison Mohs, Anne-Lise de Caillou Paris et Etienne et Pither de La Collection Noire, boutiques-antiquaires spécialisés en bijoux anciens, et Salomé Kassabi, fondatrice de Gigi Paris, marque de bijoux vintages et upcyclés.
Plusieurs raisons à leur popularité
Que ce soit pour la plus-value d’un bijou (presque) unique, préserver le patrimoine, donner une seconde vie à un bijou avec une forte valeur émotionnelle ou historique ou pour raisons écologiques (ndlr, l’extraction des pierres et métaux est l’une des industries les plus polluantes), chacun·e a une bonne excuse pour acheter du vintage ou de l’upcyclé.
Selon Céline Moret, cela s’explique parce qu’aujourd’hui nous sommes tous·tes en quête de sens. « Et se réapproprier un bijou ancien, c’est avancer dans cette quête, se distinguer. Tous·tes nos acheteur·ses sont à la recherche d’un bijou avec une personnalité propre qui les fera se sentir uniques. Il ne faut pas oublier non plus l’aspect gestion des ressources naturelles. On parle beaucoup d’upcycling, d’économie circulaire… Le bijou vintage s’inscrit parfaitement dans cette tendance : réemployer des bijoux déjà fabriqués qui ont mobilisé des ressources il y a longtemps et qui, aujourd’hui, n’ont plus d’impact sur la planète – que ça soit d’un point de vue humain ou matériel, d’ailleurs. » Anne-Lise de Caillou Paris approuve : il y a plusieurs raisons qui éclairent ce renouveau de popularité. L’économie circulaire et le rapport qualité-prix, bien sûr, mais aussi l’émotion. « Je suis peut-être fleur bleue mais ces bijoux sont le témoin d’une époque, d’un style, d’un savoir-faire… Ça crée une émotion, une poésie auxquelles les gens peuvent être sensibles. Le bijou devient leur trésor, une pièce unique qui a du sens et qu’ils peuvent transmettre à leur tour. »
La motivation du beau
Pour vendre du bijou vintage, il faut être passionné·es. Et toutes ces marques s’accordent sur au moins un point : il faut avoir plusieurs pistes de recherche. Puces, friperies, enchères, particulier·es ou professionnel·les de France et du monde entier… Pour Etienne et Pither de La Collection Noire, en tout cas, ce parcours était logique. Il leur paraît aberrant de laisser dormir des bijoux d’exception dans un tiroir. Pour eux, l’intemporalité du bijou (et la cyclicité de la mode) permettent qu’ils soient toujours – ou redeviennent forcément – tendances… Parfait pour l’écologie. « Nous avons plusieurs sources d’approvisionnement et collectons nos bijoux dans le monde entier, notamment par le biais de rencontres, de voyages, d’évènements professionnels… Puis, nous leur offrons une mise en état avant de les intégrer à notre catalogue et de les proposer à la vente. Nos pièces reflètent notre curation et s’inscrivent dans une démarche de relecture plutôt que de transformation. »
À l’inverse, en plus de leur collection vintage, Gigi Paris upcycle des pièces trop abimées pour être vendues telles quelles. C’est un autre prisme d’action, différent mais tout aussi intéressant qui permet de suivre les tendances. Et pas forcément besoin d’un bijou pour créer du bijou… Ça, Salomé Kassabi l’a appris très vite. « Dans ma famille, nous sommes antiquaires de génération en génération. Le monde de l’antiquité et de la brocante est un univers aussi merveilleux que nécessaire, la circularisation de notre économie étant l’un des enjeux du siècle. En 2020, la mode du jetable appartient au passé, les gens veulent consommer mieux et limiter leur impact. Je lance alors la création d’un collectif d’antiquaires 100% féminin, que GIGI Paris digitalise. En pleine pandémie, on nous demande d’aider aussi des antiquaires qui ne font pas de bijoux. Sans le préméditer, nous lançons notre technique d’upcycling. On achète des pièces de modes abîmées ou démodées, on prélève la bijouterie dessus (ndlr, fermetures éclaires, boutons en acier, cadenas…) et on transforme le tout en colliers ou bracelets. » Un bon compromis, qui permet aux adeptes de fast fashion d’avoir une pièce qui répond à ces codes et a l’air neuve mais ne l’est pas à 100%… Et qui est créée avec une main d’œuvre éthique, aussi. « Selon nous, ce n’est pas seulement important, c’est vital de réinventer la mode. » Et on est bien d’accord.
Les bijoux restaurés ou upcyclés seraient-ils donc la solution pour la mode de demain ?