« Portrait d’une écrivaine » : Morgane Ortin dévoile sa chambre à soi

En hommage à son dernier recueil publié, "La Chambre sans murs", l'autrice Morgane Ortin est mise en scène de manière intime à travers le regard de la photographe Albertine Hadj.

Morgane Ortin, "Portrait d'une écrivaine" © Albertine Hadj

Elle tire le verrou derrière les dernier·ères invité·es qui tardent à libérer son intimité. Mais que se passe-t-il pendant ce moment particulier de solitude après une fête, mélangeant apaisement et attente ? Albertine Hadj et Sarah Lespagnol brossent un portrait visuel, introspectif et lyrique de l’écrivaine Morgane Ortin, utilisant la mode pour rompre avec l’iconographie habituellement sobre et peu glamour des écrivaines passées.

À la faveur d’une exploration nostalgique, la fondatrice d’Amours solitaires partage les correspondances qu’elle trace entre fête, mélancolie et littérature. Entretien.

PAUL·E : Pourquoi ce titre « La Chambre sans murs » ?

Morgane Ortin : Le titre du recueil provient d’un des poèmes qu’il contient. Le vers entier est : « la chambre sans murs et sans lune ».
La strophe entière est la suivante :
« il avait tant de vigueur dans les émotions
que je me délestais de mon corps
pour pénétrer dans la chambre
sans murs
et sans lune
où l’on ne s’entretient plus qu’avec la chair
de nos idées
et la peau
de notre fragilité »
Ce titre, c’est un hommage à Virginia Woolf  et sa fameuse « chambre à soi ». Ce recueil, je l’ai écrit quasiment uniquement dans ma chambre durant ces six années. Dans la chambre sans murs que j’ai occupée tout ce temps, je suis tombée amoureuse, j’ai virevolté, j’ai découvert mon corps, j’ai eu le coeur brisé, j’ai traversé le désert, j’ai brisé mon corps, j’ai visité ma peine jusqu’à ne plus vraiment me reconnaître, et dans toute cette confusion, j’ai rencontré mes propres mots. Ce livre est la preuve que les murs qui tombent le font pour laisser entrer la lumière. Depuis je ne ferme plus mes volets. J’aimais l’idée aussi de l’ambivalence de ce titre : si d’abord le fait qu’il n’y ait aucun mur dans ma chambre ait pu m’angoisser car je n’avais rien à quoi me raccrocher, petit à petit, l’horizon laissé par cet espace ouvert m’a permis de guérir et de devenir libre.
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Morgane Ortin, "Portrait d'une écrivaine" © Albertine Hadj

P. : Que souhaitez-vous exprimer à travers cette série photographique ?

M.O. : On avait envie avec la photographe Inès Albertine de dresser un portrait intime à l’heure de l’emménagement dans ma nouvelle chambre sans murs. Un portrait proche de mon métier, l’écriture, mais qui aille aussi montrer d’autres aspects de ma personnalité : le fantasme, la mélancolie, l’attente, la fête aussi, les moments d’euphorie, mais aussi et surtout les matins qui suivent les nuits agitées, les matins faits de solitude, où sous les très beaux vêtements restent une intimité parfois tourmentée.

P. : Selon vous, quel livre décrit le mieux la fête ?

M.O. : J’ai immédiatement pensé à « Correspondance passionnée » d’Anaïs Nin et Henry Miller, ainsi qu’au journal d’Anais Nin. Elle raconte dans ces deux livres sa vie festive et souvent décadente pour l’époque, dans toutes les rues de Paris notamment. C’est une lecture rafraîchissante et libérée !
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Morgane Ortin, "Portrait d'une écrivaine" © Albertine Hadj

P. : Et quel livre décrit le mieux la solitude et l’attente de quelque chose ?

M.O. : « Le ravissement de Lol V. Stein » de Marguerite Duras, qui est l’un de mes livres préférés. Lol, le personnage principal, passe son temps, seule, à errer dans l’attente obsessionnelle de retrouver un amour qui lui a été dérobé, ou plutôt « ravi » pour reprendre le titre.

« À propos d’amour » de bell hooks devrait être obligatoire pour tout être humain en âge de relationner. »

 

P. : On ne peut s’empêcher de vous questionner sur le livre qui décrit le mieux les relations amoureuses…

M.O. : Sans aucune hésitation « À propos d’amour » de bell hooks. C’est une lecture qui devrait être obligatoire pour tout être humain en âge de relationner.
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Morgane Ortin, "Portrait d'une écrivaine" © Albertine Hadj
Morgane Ortin, "Portrait d'une écrivaine" © Albertine Hadj

P. : Enfin, quel livre pourriez-vous relire à l’infini ?

M.O. : De la poésie bien sûr, et plus précisément, « Commune présence » de René Char. Ce livre m’a fait découvrir ce genre merveilleux. Aujourd’hui, c’est un peu comme un doudou pour moi, sa simple couverture a quelque chose de rassurant.

 

Credits stylisme

Photo 1

BAGUE : LA MANSO X TÉTIER BIJOUX

Photo 2

ROBE : JEAN PAUL GAULTIER

CHAUSSURES: FINDAN NOVRUZOVA

ACCESSOIRES : STYLIST ARCHIVES

Photo 3

ROBE : THE BIGGEST SWAMP EVER CHAUSSURES : STYLIST ARCHIVES

Photo 4

ROBE : NOELLE FUSTER

BIJOUX: LARUICCI

Photo 5

TOP : STYLIST ARCHIVES

BIJOUX: LARUICCI


Crédits série photographique

Starring Morgane Ortin @morganeortin
Photographe Albertine Hadj @albertine.disparue
Styliste Sarah Lespagnol @sarah_lespagnol
Assistantes styliste  Marika Cataldo @iconicbrainstorm Marion Schmitt @marion.schmitt_
Set designer Manon Sim @simonelanemone
Hairstylist Philémon Brunet @philemonbrunet
MUA Chaïm Vischel @195cc
Production Animal Animal @animalanimalparis

 

Propos recueillis par Pascal K Douglas

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